14 juin 2004
Commentaire sur le blog de J-M Billaut
Ci-dessous le commentaires que je place sur le blog de Jean-Michel Billaut
(par ailleurs très intéressant), à propos d'un post correspondant à un
éditorial à parraître dans le bulletin de l'Ardesi Midi-Pyrénées et
intitulé "Un new deal pour la France".
Je le place ici, car comme je vous l'avais dit dans mon premier post,
j'écrirai aussi tout ce qui m'intéressera d'écrire, même si ce n'est
pas directement avec le sujet dominant de ce blog. Je vous conseille de
lire l'article de M. Billaut, ainsi que les commentaires associés avant de lire ce qui est ma réponse.
Monsieur Billaut, (M'sieur Jean-Mi ?)
Je suis bien conscient qu'ici, chacun de nous défend sa vision de l'avenir et que nous avons probablement tout les deux raison. J'ai tendance à vous suivre sur le fond, mais je trouve votre argumentation trop simpliste et vos visées trop utopiques.
Tout d'abord, je conteste votre référence à Keynes. Dans le "new deal" de Roosevelt, la construction d'infrastructure était un but secondaire. L'objectif principal était de relancer la consommation et je vais vous expliquer ici en quoi consiste l'effet multiplicateur. Vous payez un ouvrier pour construire une autoroute. Que va faire cet ouvrier avec son salaire ? Il va peut-être en mettre 20% de coté et il va consommer le reste. Ce reste va permettre à quelqu'un d'autre de travailler, donc d'avoir un salaire. Et que va faire cet autre avec son salaire ? En consommer 80%, etc. Donc vous mettez 100, et il en ressort une consommation de :
0,8*100 + 0,8²*100 + ... = 400
Dans le même temps, l'épargne cumulée est :
0,2*100 + 0,2*0,8*100 + 0,2*0,8²*100 + ... = 100
D'où une augmentation globale des revenus de 500.
C'est celà qu'on appelle multiplicateur keynésien. L'infrastructure sert à justifier l'investissement initial de 100, et c'est plus utile que de simplement donner cet argent. On pourra trouver une explication plus détailler ici. Désolé pour les explications un peu techniques ; il m'ennuyait de passer pour un demeuré...
Supposons maintenant qu'on veuille faire la même chose pour construire des "autoroutes" de l'information. Effectivement, il se produirait un effet du multiplicateur de Keynes, mais celui-ci n'aurait pas une envergure retentissante. Connecter la France au haut débit emploiera certainement moins de main-d'oeuvre que s'il s'agissait de construire une autoroute entre New-York et Los Angeles (d'autant qu'à l'époque ils ne disposaient sans doute pas des outils performants mis aux points depuis).
De plus, si j'interprète bien votre éditorial, là ne se trouve pas la clé de voute de votre argumentation. Je réfuterai donc maintenant le reste de ce que je conteste dans votre discours.
Vous dites : "Si par contre vous êtes le premier (ou l'un des premiers) à mettre en oeuvre un réseau à TRES haut débit, vous allez susciter la création de nouvelles applications auxquelles on ne peut même pas penser avec le débit d'aujourd'hui...". Allez donc convaincre quelqu'un qu'il faut investir maintenant pour créer des applications qu'on ne peut pas imaginer. Mais peut-être avez-vous une idée derrière la tête. Dans ce cas, c'est le commun des mortels (moi y compris) qui ne peut pas les imaginer. Merci de m'éclairer sur ce point.
Ensuite vous nous annoncer : "Cela jouera en fait le rôle que l'imprimerie a joué entre la Révolution Agricole et la Révolution Industrielle : à savoir augmenter le savoir humain, et le nombre d'Etres Humains qui peuvent y avoir accès...". Et là, je dis non deux fois (non et non). Celà aura le même rôle que de nous faire passer d'une imprimerie lente et en noir et blanc à une imprimerie "rapide" et en couleur. Mon deuxième 'non' est un peu plus nuancé : vous avez raison, à long terme, le savoir humain et le nombre d'Etre Humains qui y auront accès vont augmenter, en attendant, les réseaux très haut-débit restent un "gadget" de pays riches et vous conviendrez, j'espère, que si l'on souhaite augmenter le savoir et la quantité d'humains y ayant accès, il sera plus utile de développer les accès à plus bas débit pour les milliards qui en sont actuellement privés.
Vous nous parlez aussi de culture. Vous trouverez peut-être que j'ai une bien piètre opinion de mes concitoyens, mais j'imagine assez bien le français moyen profitant de sa connexion très haut débit pour boire la même bière tout en pouvant regarder le même match de foot (resp. émission de télé-réalité, resp. feuilleton de l'été), mais attention, ce sera avec 10 angles de caméras possibles entre lesquels il pourra naviguer à volonté ! Autant pour la culture... Mais, encore une fois, si on prend comme prémisse qu'on ne sait pas quelles applications viendront, on ne peut faire que de vagues suppositions ! Voilà à quoi mènent les raisonnements à grands coups de cuillères à pot...
Vous ne commentez que très peu les implications que les très haut débit pourrait avoir sur l'accroissement des connaissances. Et pour cause, j'ai du mal à voir en quoi disposer d'une connexion à 100Mb permettrait de faire de bien plus extraordinaire que ce qui est déjà possible avec des connexions à 4Mb.
Mais que faire, alors ? Comment changer le monde avec des connexions 4Mb ?? Pour en avoir un appercu, je vous propose de lire ce très bon article, commenté par Outils Froids. Il reste encore tant d'initiatives comme celle de Wikipédia à prendre avec les connexions actuelles et qui permettent véritablement d'augmenter le savoir humain et notre intelligence collective que je ne vois pas dans l'imédiat la raison pour laquelle ces connexions ultra-rapides sont indispensables. Je concède qu'il nous faut bouger, mais je propose une autre direction.
Je vous accorde cependant qu'elles pourraient trouver un intérêt dans les années à venir, mais je pense que d'ici là, les vitesses des connexions auront évoluées d'elles-même, sans qu'il soit pour celà nécessaire d'un investissement public lourd.
Et comme je l'ai déjà dit, la vie serait certainement meilleure pour tout le monde avec du très haut débit partout.
Merci à "Poupoule" (encore un nom de code) pour m'avoir fait par de son opinion sur la question et m'avoir ainsi aidé à rédiger ce que j'admets être un pavé.
Respectueusement,
M'sieur Julien.
Monsieur Billaut, (M'sieur Jean-Mi ?)
Je suis bien conscient qu'ici, chacun de nous défend sa vision de l'avenir et que nous avons probablement tout les deux raison. J'ai tendance à vous suivre sur le fond, mais je trouve votre argumentation trop simpliste et vos visées trop utopiques.
Tout d'abord, je conteste votre référence à Keynes. Dans le "new deal" de Roosevelt, la construction d'infrastructure était un but secondaire. L'objectif principal était de relancer la consommation et je vais vous expliquer ici en quoi consiste l'effet multiplicateur. Vous payez un ouvrier pour construire une autoroute. Que va faire cet ouvrier avec son salaire ? Il va peut-être en mettre 20% de coté et il va consommer le reste. Ce reste va permettre à quelqu'un d'autre de travailler, donc d'avoir un salaire. Et que va faire cet autre avec son salaire ? En consommer 80%, etc. Donc vous mettez 100, et il en ressort une consommation de :
0,8*100 + 0,8²*100 + ... = 400
Dans le même temps, l'épargne cumulée est :
0,2*100 + 0,2*0,8*100 + 0,2*0,8²*100 + ... = 100
D'où une augmentation globale des revenus de 500.
C'est celà qu'on appelle multiplicateur keynésien. L'infrastructure sert à justifier l'investissement initial de 100, et c'est plus utile que de simplement donner cet argent. On pourra trouver une explication plus détailler ici. Désolé pour les explications un peu techniques ; il m'ennuyait de passer pour un demeuré...
Supposons maintenant qu'on veuille faire la même chose pour construire des "autoroutes" de l'information. Effectivement, il se produirait un effet du multiplicateur de Keynes, mais celui-ci n'aurait pas une envergure retentissante. Connecter la France au haut débit emploiera certainement moins de main-d'oeuvre que s'il s'agissait de construire une autoroute entre New-York et Los Angeles (d'autant qu'à l'époque ils ne disposaient sans doute pas des outils performants mis aux points depuis).
De plus, si j'interprète bien votre éditorial, là ne se trouve pas la clé de voute de votre argumentation. Je réfuterai donc maintenant le reste de ce que je conteste dans votre discours.
Vous dites : "Si par contre vous êtes le premier (ou l'un des premiers) à mettre en oeuvre un réseau à TRES haut débit, vous allez susciter la création de nouvelles applications auxquelles on ne peut même pas penser avec le débit d'aujourd'hui...". Allez donc convaincre quelqu'un qu'il faut investir maintenant pour créer des applications qu'on ne peut pas imaginer. Mais peut-être avez-vous une idée derrière la tête. Dans ce cas, c'est le commun des mortels (moi y compris) qui ne peut pas les imaginer. Merci de m'éclairer sur ce point.
Ensuite vous nous annoncer : "Cela jouera en fait le rôle que l'imprimerie a joué entre la Révolution Agricole et la Révolution Industrielle : à savoir augmenter le savoir humain, et le nombre d'Etres Humains qui peuvent y avoir accès...". Et là, je dis non deux fois (non et non). Celà aura le même rôle que de nous faire passer d'une imprimerie lente et en noir et blanc à une imprimerie "rapide" et en couleur. Mon deuxième 'non' est un peu plus nuancé : vous avez raison, à long terme, le savoir humain et le nombre d'Etre Humains qui y auront accès vont augmenter, en attendant, les réseaux très haut-débit restent un "gadget" de pays riches et vous conviendrez, j'espère, que si l'on souhaite augmenter le savoir et la quantité d'humains y ayant accès, il sera plus utile de développer les accès à plus bas débit pour les milliards qui en sont actuellement privés.
Vous nous parlez aussi de culture. Vous trouverez peut-être que j'ai une bien piètre opinion de mes concitoyens, mais j'imagine assez bien le français moyen profitant de sa connexion très haut débit pour boire la même bière tout en pouvant regarder le même match de foot (resp. émission de télé-réalité, resp. feuilleton de l'été), mais attention, ce sera avec 10 angles de caméras possibles entre lesquels il pourra naviguer à volonté ! Autant pour la culture... Mais, encore une fois, si on prend comme prémisse qu'on ne sait pas quelles applications viendront, on ne peut faire que de vagues suppositions ! Voilà à quoi mènent les raisonnements à grands coups de cuillères à pot...
Vous ne commentez que très peu les implications que les très haut débit pourrait avoir sur l'accroissement des connaissances. Et pour cause, j'ai du mal à voir en quoi disposer d'une connexion à 100Mb permettrait de faire de bien plus extraordinaire que ce qui est déjà possible avec des connexions à 4Mb.
Mais que faire, alors ? Comment changer le monde avec des connexions 4Mb ?? Pour en avoir un appercu, je vous propose de lire ce très bon article, commenté par Outils Froids. Il reste encore tant d'initiatives comme celle de Wikipédia à prendre avec les connexions actuelles et qui permettent véritablement d'augmenter le savoir humain et notre intelligence collective que je ne vois pas dans l'imédiat la raison pour laquelle ces connexions ultra-rapides sont indispensables. Je concède qu'il nous faut bouger, mais je propose une autre direction.
Je vous accorde cependant qu'elles pourraient trouver un intérêt dans les années à venir, mais je pense que d'ici là, les vitesses des connexions auront évoluées d'elles-même, sans qu'il soit pour celà nécessaire d'un investissement public lourd.
Et comme je l'ai déjà dit, la vie serait certainement meilleure pour tout le monde avec du très haut débit partout.
Merci à "Poupoule" (encore un nom de code) pour m'avoir fait par de son opinion sur la question et m'avoir ainsi aidé à rédiger ce que j'admets être un pavé.
Respectueusement,
M'sieur Julien.
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